Don't torture yourself that's my job

Rendre quelqu'un fou, lui faire perdre tous ses moyens et détruire chaque petite parcelle de sa santé mentale n'avait absolument rien de facile. Cela demandait de la patience, un certain doigté et surtout une bonne dose de débrouillardise quand on ne possédait pas un pouvoir susceptible de troubler volontairement ou non l'esprit d'un être faible. Faisant cela depuis plus d'une décennie, voire deux siècles si l'on comptait son ancienne appartenance à la sphère des Cauchemars, la créature démoniaque avait jeté son dévolu sur une nouvelle victime. Espérance. Être fragile et instable. Rien de mieux pour se divertir surtout si cela consistait à la rendre de plus en plus paranoïaque. Quelle était la manière la plus efficace? Eh bien, rien de plus simple... Suivre une fille seule au beau milieu de la nuit sans jamais dévoiler son visage ou encore sa propre présence s'avérait une façon très efficace pour parvenir à ses fins...

Cette nuit-là, la Démone l'avait suivi pendant de nombreuses minutes, faisant parfois du bruit dans le but de l'obliger à se retourner ou encore en laissant simplement flotter un sentiment d'être épié chez la jeune femme. Quel délicieux spectacle à observer et malgré qu'elle ait fait cela plus d'une centaine de fois, la scène l'amusait toujours autant. Avec les humains, petites bestioles imprévisibles, la fin ne s'annonçait jamais identique d'une fois à l'autre... Une fois lassée de ce petit jeu du chat et de le souri, la cornue avait simplement rebroussé chemin afin de retourner chez elle pour le reste de la nuit. Si elle s'endormit d'un sommeil profond et réparateur, cette dernière ne pouvait peut-être pas en dire autant de son nouveau jouet.

Ce fut la vibration de son portable qui la tira de ses songes. Un sms de la part d'un de ses contacts qui connaissait un type fournissant des œuvres d'art à la Galerie Alcala qui avait en sa possession un nouveau masque qui allait mettre en valeur sa propre collection personnelle. Le problème? C'était que la Démone devait passer par Lisbeth, Prince Démon des Dons Artistiques, afin d'acquérir l'objet convoité. Autant dire tout de suite que ce n'était pas avec l'argent que l'échange allait se réaliser et encore moins par le vol - cleptomane ou non, jamais l'idée de voler un Prince Démon lui avait passé à l'esprit -, mais probablement par un échange d'un objet ayant une valeur similaire ou encore en lui promettant quelques services ingrats. Cela valait bien un petit sacrifice, non? Donc, peu de temps après s'être levée du lit, Likho se préparait déjà à partir vers la galerie d'art...

Une gothique au milieu d'une exposition. Un cliché ou bien était-ce quelque chose de surprenant? Par en juger les regards qu'elle attirait sur sa petite personne sans pour autant ouvrir une seule fois la bouche, la deuxième option semblait presque la meilleure. En même temps, avec tous ces gens autours qui se prenaient pour de grands connaisseurs, alors que leur culture générale de l'art s'étendait sur deux ou trois bouquins lus pendant leurs études, la jeune femme ne se sentait pas du tout intimidé par leurs regards. Alors que c'est talons hauts claquaient sur le sol du deuxième étage de la galerie, Likho passait en revue chacune des pièces avec une attention particulière à certaines d'entre elles. Enfin, c'était ce qu'elle souhaitait laisser paraître, car l'immortelle attendait sagement l'arrivée du Prince Démon. Au bout de longues minutes, la créature démoniaque s'aventurait vers un autre coin du deuxième étage, là où une silhouette connue lui tournait le dos. Espérance. Retenant un petit sourire mauvais, la brunette s'approcha à pas feutrés de l'humaine, ses mains jointes dans son dos dans une position presque désinvolte, puis une fois à sa hauteur, cette dernière se pencha lentement vers elle jusqu'à ce que sa bouche soit près de son oreille. On vient admirer les œuvres d'art honey? Demanda-t-elle gentiment avant de continuer sur sa lancée. Est-ce que ça t'inspire quelque chose? Ou bien est-ce que ça te fait monter des émotions à la surface? Du genre une violente crise de paranoïa face à un psychopathe qui te suit nuit et jour dans les rues de la ville? Tout ça avait été prononcé sur le ton de la conversation comme si la Démone ne faisait pas du tout illusion à son petit manège qu'elle mettait en place depuis un bon moment. S'écartant d'un pas sur le côté afin de laisser une courte distance entre elles deux, Likho haussa légèrement le ton sans chercher à attirer l'attention. Ahhh l'art... On peut l'interpréter de plusieurs façons, tu ne trouves pas?

La vie n'était-elle pas magnifique? Voilà que la fille des enfers venait de trouver une occupation en attendant Lisbeth. Il fallait bien entretenir la graine de la folie de temps en temps, non?

FICHE ET CODES PAR BROADSWORD.